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"Nomadland" a réussi là où Hollywood se plante depuis toujours - Le HuffPost

CINÉMA - Golden Globes, BAFTA Awards, Mostra... Depuis le début de la saison, aucune cérémonie ne résiste à “Nomadland”. Pas même les Oscars. Ce mercredi 9 juin, le long-métrage de Chloé Zhao, qui a reçu le titre du “meilleur film” lors de la 93e cérémonie au mois d’avril à Los Angeles, sort enfin en salles en France.

Son histoire, adaptée du livre de Jessica Bruder, est celle d’une dénommée Fern. Jouée par Frances McDormand (“Three Billboards”), la sexagénaire décide, après l’effondrement économique de la ville ouvrière dans laquelle elle a vécu, de prendre la route à bord de son van pour se lancer dans une vie de nomade à travers les États-Unis. De petits boulots en petits boulots, elle intègre une communauté de personnes d’un certain âge qui, comme elle, ont fait le choix de rompre avec la société.

Ce récit d’émancipation est bouleversant. Il parle d’une réalité méconnue, à nous Français, mais n’en est pas moins universel. En cause, le traitement de la problématique de fond: l’âgisme, c’est-à-dire l’ensemble des stigmatisations et formes de mépris dont sont victimes les personnes âgées aujourd’hui.

Découvrez ci-dessous la bande-annonce de “Nomadland”:

Un thème cher au coeur de la réalisatrice. “Dans de nombreuses civilisations et cultures traditionnelles, les aînés sont considérés comme des éléments très importants dont on peut apprendre, estime Chloé Zhao, interrogée par Le HuffPost. À l’inverse, dans les sociétés capitalistes, si vous ne contribuez pas à l’économie du pays, on considère que vous pouvez être jeté après usage.”

La pandémie, une crise révélatrice

Elle poursuit: ”Évidemment, les personnes âgées tombent dans cette catégorie. C’est ce qu’on a pu observer dans la pire des situations, en ce moment, en temps de pandémie. Je pense que c’est une problématique à laquelle nous devons toutes et tous prêter attention.”

Ces propos ne tombent pas de nulle part. D’après une tribune publiée dans le Financial Times au mois de mars dernier, le taux de chômage des travailleurs américains âgés de plus de 55 ans a dépassé celui des travailleurs en milieu de carrière, une première en cinquante ans. Selon un rapport, trois millions de séniors, aux États-Unis, ont perdu leur emploi en janvier en vue de la récession liée à la crise sanitaire. Le phénomène n’épargne aucun secteur. Le cinéma, y compris.

Dans “Nomadland”, l’actrice principale, qui fêtera ses 64 ans au mois de juin prochain, partage l’affiche avec David Strathairn, 72 ans. Ils sont accompagnés d’un casting d’amateurs, de vrais nomades pour la plupart, qui ont, toutes et tous, entre 60 et 80 ans. Pour un film hollywoodien, c’est rare. 

8% des rôles

Depuis plusieurs années, des voix s’élèvent pour dénoncer l’absence de représentation des personnes âgées, et notamment des femmes, sur le grand écran. Au mois de février, le choix de laisser Carey Mulligan, 35 ans, interpréter une héroïne de 56 ans dans “The Dig” n’a pas fait l’unanimité. Plus récemment, Carrie-Anne Moss (“Matrix”) a confié, dans les colonnes du Hollywood Reporter, qu’on lui a proposé le rôle d’une grand-mère à l’aube de ses 40 ans. Dans “Alexandre” d’Oliver Stone, sorti en 2005, Angelina Jolie campe, elle, le rôle de la mère du héros. Elle n’avait, à l’époque, qu’un an d’écart avec Colin Farrell, interprète du protagoniste.

Selon une étude du Journal of Management Inquiry, en 2014, l’absence de contrats s’accompagne également d’une baisse de salaires. À partir de l’âge de 34 ans, les actrices seraient moins appelées et moins bien rémunérées. Chez les hommes, les cachets augmentent jusqu’à 51 ans, puis se stabilisent.

La France n’est pas exempte de ce phénomène discriminant. Au mois de janvier dernier, le collectif “Tunnel de la comédienne de 50 ans”, qui compte notamment dans ses rangs Blandine Metayer et Souad Amidou, a pointé du doigt l’imaginaire collectif selon lequel le public ne veut voir que des femmes jeunes à l’écran, rappelant par là même que seuls 8% des rôles ont été attribués à des femmes de plus de 50 ans en 2019.

Célébrer la vieillesse

Catherine Deneuve, chez nous. Meryl Streep, Helen Mirren, Jane Fonda, Sharon Stone, aux États-Unis. Des actrices de plus de 55 ans, il en existe, mais se comptent sur les doigts d’une main. Elles sont “l’arbre qui cache la forêt”, commente à l’AFP Catherine Piffaretti, autre figure du collectif français.

Quand on parle de diversité, nous dit Chloé Zhao, “on oublie parfois d’y introduire les personnes âgées”. “L’âgisme est un problème important et concernant. Notre société évolue si rapidement dans sa manière de célébrer la jeunesse, mais ne rend pas du tout hommage à ce que prendre de l’âge peut apporter, poursuit la cinéaste chinoise. De fait, on voit le fait de vieillir et mourir comme une chose négative, alors que c’est une expérience magnifique par laquelle nous passons toutes et tous.”

Elle conclut: “Je pense que construire des récits mettant en scène des personnes âgées devant la caméra et les magnifier ne peut que faire de nous une société plus saine. Cette partie de la vie est, elle aussi, incroyablement intéressante.” Son film ouvre une brèche à Hollywood. Il est possible de vivre une vie authentique et pleine de sens, passé les 55 ans.

À voir également sur Le HuffPost: Florian Zeller nous raconte ce moment où il a annoncé son Oscar à Anthony Hopkins

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